Courseulles-sur-mer

Publié le par Catherine de Normandie

L’avocate est repartie en chasse. Elle n’a pas eu besoin d’aller très loin. Il lui a suffi d’insister auprès des Pompes Funèbres : les cendres y étaient depuis la crémation, le 16 avril 2005. La famille R. était chargée des obsèques.


La représentante de cette famille était Gloria, une petite-nièce de mon père qui, paraît-il, considérait le père de Gloria comme son fils.


Je l’avais rencontrée lors de mon premier voyage à Chicago. Extrêmement affectueuse avec moi, elle m’avait écrit ensuite des mails très touchants, m’informant même qu’un héritage à mon profit aurait été détourné par ma cousine Marilyn. Et brutalement, plus rien. Lors de mon deuxième séjour à Chicago, elle n’a pas eu le temps de me venir me voir.


Après les obsèques de ma cousine Marilyn, je lui avais demandé de me dire à présent où était la sépulture de mon père. Pas de réponse.


J’ai immédiatement transféré le mail de l’avocate à Gloria. Une demi-heure plus tard, elle répondait se disant « très étonnée… Elle était à la cérémonie des obsèques, mais ne savait pas qu’elle en était chargée.. Elle allait immédiatement faire le nécessaire, elle aimait tant l’oncle Bud ! ».


En quelques minutes, je suis passée de l'ombre à la lumière. La cousine de "Paris, France," que l'on expulsait avec le silence devint soudain une personnage illustre et les mails de Gloria se mirent à tomber comme la pluie d'une onde tropicale. J'étais informée, quasiment à la minute près, de chacune de ses démarches en direction des Pompes Funèbres.


Au départ, elle m’a proposé de commander une plaque – que l’Armée paierait – et de transférer les cendres au cimetière militaire.


La perspective de retourner à Chicago ne m’enchantait pas plus que celle d’embrasser des cousines hypocrites qui viendraient pleurer "leur cher uncle Bud" après avoir abandonné sa dépouille. Que serait-il advenu des cendres si je n'étais pas intervenue?


Et comment ces gens-là avaient-ils traité mon père à la fin de sa vie ?

 

Il y a aussi mes enfants.


Ils sont avec moi les seuls descendants de cet homme dont ils n’avaient qu’une notion abstraite « le père inconnu de maman », bien qu’ayant quelques caractéristiques physiques rappelant l’Afrique – ou les « pays du soleil ». On peut savoir d’où l’on vient, certes, mais autre chose est de concrétiser cette notion par un contact physique, réel.


Alors, j’ai demandé à recevoir les cendres de mon père.


L’avocate m’y a encouragée : Beaucoup d’Américains renvoient les cendres en Europe de leurs proches en Europe par colis postal, pour éviter les longueurs administratives.


Comme d’habitude, Kimsue et Rebecca ont levé les obstacles matériels. L’expédition s’avérant trop chère pour ma cousine Gloria, Kimsue lui a envoyé 50$ par courrier. Quelques jours plus tard, les cendres arrivaient chez moi, à Paris, dans leur sac plastique d’origine, avec le certificat de crémation.


Deux semaines plus tard, nous avons organisé un petit séjour en Normandie tous les trois, Marion, Nicolas et moi. Au passage, nous sommes allés jeter des cendres au cimetière de Caudebec, sur la tombe de ma mère. Puis nous sommes partis vers Courseulles, en Normandie, par où mon père serait peut-être arrivé.



C’était une très belle journée, la marée était basse, nous avons donc marché assez loin pour être isolés, et là, nous avons dispersé les cendres sur la plage.

 


La fin de l’histoire de la recherche mon père a eu lieu le 21 juillet 2009.

 

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J
Bien-sûr Catherine, fais tout ce que tu veux pour faire vivre ton blog et ta cause.<br /> En attendant cet apéro virtuel, ce soir, puisqu'il était aussi amateur, je boirai mon Scotch en pensant à Bud ...
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C
<br /> Quelle bonne idée ! En Afrique (et aux Antilles aussi) quand on ouvre une bouteille, on verse quelques gouttes à terre pour les ancêtres. Alors si tu vas à Courseulles...  (mais fais simple,<br /> pas de Lavagulin de 25 ans!) Par contre, on pourrait peut-être commémorer quand Michel sera là l'an prochain ??<br /> <br /> <br />
J
Bonjour Catherine,<br /> Heureux de retrouver ces photos prises de vous trois il y a déjà bientôt un mois. C'est bien car malgré l'émotion, ma main n'a pas tremblé ! Techniquement, serait-il difficile de publier la vidéo ? Mais peut-être préfères-tu lui conserver un caractère strictement familial ...<br /> Encore toute mon amitié.<br /> A bientôt.<br /> Jo
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C
<br /> Je vais demander à mes enfants ce qu'ils en pensent. Techniquement, ça semble possible.<br /> Sur la page suivante, je publierai des photos des amis qui m'ont aidée ici, façon "banquet" virtuel (sans hélas partager le Scotch qui était la boisson préférée de mon père).<br /> Puis-je mettre la photo où nous sommes ensemble ?<br /> <br /> Ce fut une très très belle aventure.<br /> Amitiés à toi, et merci encore.<br /> <br /> <br />