Kimsue et Rebecca

Publié le par Catherine de Normandie


 

La quête du père n’a rien à voir avec la recherche généalogique. Elle draine toutes les espérances, tous les fantasmes autour desquels on a bâti tant bien que mal son identité.


Remettre en cause ces fondements suppose des bases solides, ou des branches auxquelles s’accrocher .


En partant à fond dans cette recherche, j’imaginais le meilleur : le père qui, bien que très vieux, aurait « toute sa tête », serait heureux de me retrouver, des frères et sœurs affectueux, une famille aimante, etc.., et le pire : un vieil homme qui me rejetterait en disant : « ça n’est pas moi ». Le flop complet, le gros chagrin.


J’ai trouvé à Chicago une famille qui m’a reconnue comme la « fille de l’oncle Bud » et m'a repoussée. Elle n’a pas compris mes motivations. Je n’ai pas compris son attitude.

 

Peu de gens s’intéressent à nos histoires de fils ou filles d’Américains, ni à ce qu’ont vécu nos mères, enceintes d’un homme Noir parfois, dans les campagnes françaises après la guerre. Des souffrances que nous avons du porter à notre tour,  chacun dans notre coin, dans la solitude la plus totale, souvent dans la honte, le rejet social, l’indifférence des administrations de nos pays.

 

Et pourtant pendant cette recherche me sont venues des aides, quasiment miraculeuses, à chaque étape.


 

Mes piliers ont été Kimsue et Rebecca, deux soeurs Américaines rencontrées par Internet.



Sans elles, leur pugnacité, leur investissement total à mes côtés, je serais restée sur la route, ruminant mes aigreurs jusqu’à la fin de ma vie.


 



Durant ces 4 années, elles ont été près de moi, respectant mes silences, mes découragements, repartant à la chasse dès que j’avais une information ou une idée.

 

Au début, je leur avais transmis le peu que je savais : le numéro matricule de mon père, son adresse. Peu à peu, elles ont déroulé le fil de l’histoire, explorant aux USA toutes les pistes possibles, insistant à la fin auprès de ma cousine Gloria pour l’envoi des cendres de mon père, lui envoyant les 50$ nécessaires à l’expédition du colis, m’accompagnant de cœur jusque sur la plage de Courseulles.

 

Même si je n’ai pas trouvé de famille là-bas, le simple fait que l’on reconnaissance ma douleur d’enfant déracinée a suffi à me donner confiance en moi, à m’aider à reconstruire mon identité.

 

Je sais peu de choses sur Kimsue et Rebecca. Je parle mal l’anglais, mais petit à petit, nous avons tissé des liens au-delà du langage.

 

Je sais que leur père a participé au débarquement de 1944. Qu’il a été parachuté à Ste-Mère-Eglise. De là, il est allée en Belgique. Il y a vécu une histoire d’amour. De cette histoire est née une fille, Huguette.


Quand elles ont appris qu’elles avaient une sœur en Europe, Kimsue et Rebecca se sont lancées à sa recherche. Elles l’ont retrouvée, mais trop tard. Leur père avait quitté ce monde.

 

Elles ont ensuite retrouvé quelques familles en Belgique, en France.

 

Pour tout paiement, elles ne demandent qu’une photo avec notre famille, puis elles retournent à leurs affaires.


Lors du pèlerinage en Normandie, je portais sur moi la photo de leur père. Nous l'avons ensuite emmenée à Ste-Mère-Eglise.


 Rebecca and Kimsue's Dad.



En cherchant mes racines, j’ai rencontré l’amitié, le désintéressement, la foi en la justice humaine qui transcende les lois, les décrets. Et j’ai trouvé ma vraie famille américaine : Kimsue et Rebecca sont devenues mes sœurs, mes amies, mes mamans.

 

En France aussi, comme le Petit Poucet, j'ai trouvé des cailloux blancs sur le chemin.

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
K
I am so honored to have part of your journey..Becky and I love you very much and you know we think of you as sister..Our fathers were honorable men and they will live in our hearts forever.
Répondre
C
<br /> I feel honored for you helping me so kindly. We are sisters in the American dream.<br /> <br /> <br />